Le Mexique.
 
Carte

Lundi 22 Février, 13 heures. Après 18 jours de mer et 2000 Milles, Nous mouillons incognito dans la petite baie de Galeta de Campos. Il y a trois bateaux américains au mouillage. L'un d'eux nous demande si nous avons essuyé la tempête en mer !!! My God…La nuit dernière le vent était soutenu, mais certainement pas tempétueux.

Cette petite escale est avant tout technique. La carène s'est couverte d'anatifes. Nous devons la gratter pour que le bateau retrouve sa vélocité, réparer le moteur qui fait des siennes et a bien du mal à démarrer, vérifier le gréement en montant au mât, acheter quelques fruits et légumes et nous dégourdir les jambes… Cette petite ville est curieuse. La rue principale est bordée de chaque côté par de petites boutiques où nous trouvons de bons produits frais en toute sécurité… Et pour cause, la rue est pleine de camions militaires. Les hommes, kalachnikov en bandoulière sont presque aussi nombreux que les habitants. Nous sommes en illégalité, un contrôle d'identité nous conduirait au poste, alors prudence, ne nous attardons pas trop et soyons discrets. Le mouillage est rouleur, mais après tant de jours en mer c'est doux comme une caresse. Le 24, nous reprenons la mer pour les derniers 120 milles avant notre entrée officielle au Mexique.



Jeudi 25 Février 10H. Nous mouillons devant la capitainerie et l'immigration du port de commerce de Manzanillo. Trois heures plus tard, nous sommes en règle et pouvons descendre à terre. Nous traversons la baie pour retrouver le mouillage réservé aux voiliers. Une quinzaine de voiliers américains sont à l'ancre. Nous avons l'agréable surprise de retrouver Joe et Adrienne sur Blue-Bottle que nous avions connu en Equateur.



Nous sommes encore bien loin de la mer de Cortez désertique et sauvage. Ici, c'est « La côte d'Azur » du Mexique. Les hôtels de luxe pour Américains fortunés se suivent et se ressemblent. C'est joli, propre, clinquant, il y a de belles piscines… Mais c'est artificiel et sans intérêt. Nous y restons une petite semaine, histoire de récupérer de la traversée et commençons notre remontée vers le nord


Première étape : Laguna Navidad à 28 milles au Nord-Ouest. Calme plat, 28 milles au moteur. L'ancre tombe dans trois mètres d'eau dans un très joli lagon Sur la droite, une marina est couplée à un hôtel luxueux… Sur la gauche, Barra de Navidad est une petite ville balnéaire populaire et tranquille où il fait bon flâner. Quelques kilomètres plus au nord, à l'autre bout de la plage, la ville de Melaque qui est plus authentique nous attire comme un aimant.

Aymeric est français, boulanger et heureux.
Le mouillage de Melaque.
Ils sont nombreux les pêcheurs et les ramasseurs de coquillages à Laguna Navidad.
Seulement quelques dizaines de mètres séparent ces deux extrêmes.

Et nous continuons notre remontée vers la mer de Cortez. Il y a de nombreux mouillages le long de cette côte. Ils sont souvent rouleurs. La houle, toujours présente, rend les débarquements acrobatiques, voir impossibles. Le 12 Mars, nous partons pour Tenacacita Bay. Calme Plat, 16 milles au moteur mais nous pêchons une belle dorade coriphène.

Les américains aiment beaucoup Tenacatita Bay. Il y a une vingtaine de voiliers et quelques grosses vedettes. Nous sommes mouillés à l'Ouest d'une longue plage de sable blanc ourlée de gros rouleaux. Le Cap'tain est content, il va pouvoir faire son footing sur une plage quasi déserte.

La grande attraction du coin est de remonter une petite rivière à travers la mangrove sur environ 5 kms. Nous arrivons tant bien que mal à embouquer le petit cours d'eau. Il y a du courant et les vagues nous malmènent. Nous remontons tranquillement dans cette belle nature sauvage en admirant quelques oiseaux avant d'arriver à Palapa, plage touristique bordée de restaurants ou nous nous régalons. Une vrai vie de vacances quoi…


Mais il ne faut pas traînailler si nous voulons arriver jusqu'en mer de Cortez. Allez, zou aujourd'hui dimanche 14 mars, nous levons l'ancre pour Chamela Bay. Calme Plat, 30 milles de moteur, mais nous pêchons deux belles carangues.

Les escales se suivent et se ressemblent. Les mouillages sont rouleurs et les débarquements acrobatiques. Les américains sont ici comme chez eux, que ce soit dans les hôtels ou en voiliers. Les mexicains d'ailleurs ne s'y sont pas trompés, ils parlent tous l'américain et sont tout étonnés de nous entendre parler espagnol. Nous reprenons la mer mardi pour La Cruz. La météo annonce des vents faibles d'Ouest, nous allons enfin (peut être) faire de la voile.


Nous mouillons à La Cruz le mercedi 17 après une traversée de merde. 100 milles au moteurCalme plat puis vent de face 20 Nds à tirer des bords aidés du moteur, puis calme plat, mais nous avons admiré des baleines qui batifolaient en tapant de grands coups de caudale dans l'eau et sautaient comme des puces (heureusement elles étaient loin), et pêché une belle carangue + une bonite.
La Cruz , petit village sympathique est au Nord d'une baie touristichicos : Banderas Bay. Les voileux américains aiment beaucoup et on se demande encore pourquoi. Le mouillage est épouvantable. Une brise solaire se lève vers 11H, forci et souffle toute la journée plein Ouest. Nous nous trouvons mouillés comme en pleine mer, Ca danse, tangue, roule à qui mieux mieux. Le vent se calme vers 17 heures avant de recommencer le lendemain. ET NOUS Y RESTERONS 17 JOURS…. Le temps de changer notre capote qui partait en lambeaux, de trouver un brûleur pour notre réchaud, traiter des points de rouille, refaire des vernis, recoller le fond de l'annexe, faire le plein du bateau en prévision de la traversée sur les Marquises etc...
Heureusement, la baie est poissonneuse. Tous les soirs à 17 heures, le cap'tain sort sa gaule pour le repas du soir. Petites bonites, pargos, baracudas et autres poisons inconnus se retrouvent dans nos assiettes.
Malgré cette suractivité, nous trouvons le temps de nous balader et profitons de petites gargotes pour manger quelques tacos. Félicitons la cuisinière, c'est délicieux.

Si la petite ville de La Cruz reste simple et authentique, le reste de la Baie de Banderas n'est que succession d'hôtels grand luxe, de magasins et restaurants haut de gamme, de plages aménagées pour le confort et la joie des touristes Américains. Ce n'est pas notre tasse de thé, mais on peut toujours écouter la mer.

Aller zou, le 3 avril nous reprenons la mer, cap sur Chacala (sans intérêt) puis sur San Blas. La mer de Cortez nous attend.


La Cruz – Chacala , 40 milles Calme plat, 10 heures de moteur… Chacala – San Blas, 25 milles Calme plat… Moteur.


Ca y est, nous sommes en Mer de Cortez… Fini le tourisme de masse. San Blas est une petite ville sans prétention mais sympathique et mexicaine, ça, nous aimons. Les gens sont ouverts et aiment parler. Nous demandons à quelques pêcheurs de nous parler de leur métier. Ils nous font monter à bord et nous parlent avec fierté de leur pêche…La crevette, les poissons, le calmar. Les bateaux sont dans un état épouvantable, les carènes sont rongées de rouille et les superstructures dégoulines de fientes… C'est triste à voir.

Mais le plus surprenant à San Blas, c'est la visite de la mangrove. La mer de Cortez est réputée pour sa faune… Regardez plutôt !!!

Moi, quand j'ai vu ces monstres avec leur terrible gueule… Cliquez ici …j' ai vraiment eu la trouille rétrospective de ma vie.


Mercredi 7 Avril 7h30. Nous quittons San Blas pour l'île Isabela . Calme plat… 40 milles au moteur, on commence en en avoir plein les oreilles.


L'île Isabela est un parc national. Une île protégée où nichent quantité de Frégates Superbes, Fous de Bassan à pieds bleus, Fous Bruns, Goélands de Heermann et Noddis. Le mouillage est mal protégé. Nous y passerons deux nuits à rouler bord sur bord. Quelle importance, ce site est magique et mérite le détour.

La Frégate Superbe.

Très grandes, avec 2,50 m d'envergure, les Frégates passent beaucoup de temps à planer, quelques fois à haute altitude. Ces oiseaux ne se posent jamais sur l'eau et prennent leur nourriture à la surface. Ils sont très agressifs, de vraies teignes… Ils attaquent volontiers les autres espèces jusqu'à les faire régurgiter leurs proies. Pendant la saison de reproduction, ils survolent les colonies d'oiseaux et s'en prennent volontiers aux jeunes encore au nid. Ils sont infréquentables, quoi. Ils nichent en colonie sur les îles. Le nid est placé à la cime d'un arbuste. Il est construit par les deux oiseaux qui couvent l'unique œuf pendant sept semaines. A l'éclosion, l'oisillon est nu. Il s'envole à l'age de 6 mois, mais est nourri pas ses parents pendant une période beaucoup plus longue, allant jusqu'a 14 mois pour les Frégates Minor de l'île Christmas. La périodicité de la reproduction est encore inconnue.

Pendant la parade nuptiale, le mâle gonfle sa poche gulaire… Irrésistible, non ?

Vieux mâles fatigués.


Jeune immature.
Femelle.
Bébés Frégate dans leurs nids.

Nous avons pu approcher à toucher ces grands oiseaux. Nous n'y avons décelé aucune trace de peur, ni d'agressivité.


Le Fou de Bassan à pieds bleus.

Les fous à pieds bleus nichent sur les îles au large du Mexique, de l'Equateur et du Pérou septentrional. Grands oiseaux avec 1,50 m d'envergure, ils pratiquent le vol battu et avancent directement, parfois au ras de l'eau. Ils se posent souvent sur les bateaux. Les Fous nichent en grandes colonies. La nidification a lieu sur des îles plates ou au contraire en haut de falaises. Les nids sont situés le plus souvent à terre. L'incubation (45 jours) est assurée par les deux oiseaux qui réchauffent l'œuf avec les palmures des pattes. Les jeunes éclosent nus. Ils sont nourris par les deux parents qui régurgitent les aliments dans leur gosier. Devenus très gras, ils jeûnent pendant une semaine avant de s'envoler à l'âge de 12 semaines.

Mâle défendant sa petite famille en essayant de nous intimider.


Fous de Bassan à pieds bleus et Fous Bruns.

Nous avons pu observer des Goélands de Heermann et quelques Noddis.

Le Goéland de Hermann niche sur la côte du Mexique. Il défend âprement son territoire. Il n'a cessé de nous harceler lorsque nous approchions de son habitat.

Les Noddis, petits oiseaux discrets étaient en petit nombre sur l'île Isabela. Ils se déplacent à faible hauteur sans s'éloigner beaucoup des côtes.



Mais ce n'est pas tout, il nous faut remonter vers le nord si nous voulons profiter de la mer de Cortez. La météo annonce des vents d'Ouest 12 Nds pour la journée… A hisser la grand-voile, hardi matelot, cap sur Mazatlan à 85 milles plus au Nord.

Et la nuit tombe sur une mer d'huile, puis le soleil se lève sur un miroir. Sur les 22 heures de traversée, nous aurons fait 2 heures de voile. Le reste, c'est pétole, calme plat, moteur, moteur, moteur.
Samedi 8 avril 10h, Nous mouillons dans le port de Mazatlan.

Depuis notre arrivée à Manzanillo, nous avons fait 365 milles en 95 heures dont 93 heures de moteur. Nos prochaines étapes seront de 200 milles jusqu'à Topolobambo puis de 250 milles jusqu'à La Paz. . La météo annonce une semaine sans vent en mer de Cortez, et notre temps est compté puisque nous quitterons le Mexique dans une quinzaine. Tout faire au moteur est au dessus de nos forces, c'est décidé, nous partirons d'ici pour la polynésie. Dommage, pour les Baleines, les Otaries, les Calamars géants et les eaux poissonneuses de la mer de Cortez, dommage pour la faune et la flore terrestre, dommage pour ces immensités désertiques et sauvages… Promis juré, nous reviendrons un jour bourlinguer en mer de Cortez.
Parole de marin…

En attendant, nous préparons le bateau, et l'équipage. Footing et marche pour muscler nos petites jambes, plein de gaz, diesel, eau, épicerie et produits frais pour le bateau, vérification du moteur, gréement, grattage de la coque, mise à jour du site, bref mille petites choses qui font que l'on se sent toujours à la bourre. La météo l'a décidé, nous partirons samedi 24 avril pour les Marquises. 5500 kms de traversée, un mois de mer. Le cap'tain a le sourire...
Voyage en voilier.