L'Atoll de Suwarrow.
 


Le jeudi 26 mai à 11 heures, nous prenons la passe de Suwarrow après une semaine de mer idyllique (Quoiqu'un peu molle souffle le Cap'tain). Nous mouillons dans 13 metres d'eau et de nombreux requins à pointe noire nous tournent autour. Nous sommes parfaitement abrités sous le vent du motu et « Julo » semble déposé, parfaitement immobile dans un écrin de beauté.


Suwarrow est un atoll inhabité d'une dizaine de km de diamètre. Il surgit de nulle part en plein pacifique. Passée la barrière de corail, les fonds descendent immédiatement à plus de mille mètres et il n'y a pas âme qui vive à moins de quatre cent km. Suwarrow qui dépend des îles Cook est un parc national. L'atoll est surveillé par deux gardiens et, si notre présence est tolérée, la zone de mouillage y est règlementée et il est strictement interdit de débarquer sur les autres îles. Mais les gardiens ne sont pas encore arrivés, l'atoll est désert et nous en profitons…

...Nous en profitons pour visiter le motu d'à côté. C'est la saison de reproduction et les nids sont nombreux. L'île est toute petite avec quelques arbres tout rabougris et de nombreux buissons. Nous en faisons lentement le tour en essayant de rester discrets. Nous dénombrons cinq espèces d'oiseaux.


La Gygis Blanche..

Assez petite, 30 cm pour une envergure de 71 cm , la Gygis Blanche a un vol léger, souvent onduleux et hésitant. Elle pique à la surface pour saisir les poissons mais ne s'immerge jamais.


Le Phatéon à brins rouges.

45 cm pour une envergure de 91 cm, il a une très longue queue (deux brins rouges vif), d'où son autre nom: "Pailles en queue" . Les phaétons se déplacent avec peine à terre. Le nid est un simple creux à même le sol. L'unique œuf est jaunâtre couvert de nombreuses stries et taches marrons ou violacées. L'incubation est assurée par les deux adultes et dure 45 jours. L'oisillon quitte le nid à l'âge de 12 à 15 semaines.


La Frégate.

Grande, 1m pour 2,30m d'envergure. Les frégates passent beaucoup de temps à planer sur leurs longues ailes immobiles. Elles nichent en colonie sur des îles. Le nid est placé dans un arbre ou un buisson. Les deux oiseaux couvent l'unique œuf pendant sept semaines. A l'éclosion, l'oisillon est tout nu, puis se couvre de duvet blanc puis gris. Il s'envole entre quatre et six mois, mais est nourri par ses parents pendant une période beaucoup plus longue.


Le Fou à pieds rouges.

Assez grand, 70 cm pour 1 m d'envergure. Les fous étaient peu nombreux sur le motu. Ils nichent généralement en grandes colonies.


Le Noddi Brun.

40 cm pour une envergure de 70 cm . Les Noddis sont largement répandus dans les zones tropicales. Ils s'enfoncent rarement sous l'eau et prennent de petits poissons en volant au ras de l'eau. On en voit souvent de grandes bandes là où les poissons sautent à l'air libre pour échapper aux bonites ou autres prédateurs.


Nous explorons l'île en long et en large. Nous découvrons les bâtiments en dur destinés aux gardiens, un petit local baptisé « Yacht Club », des réservoirs d'eau de pluie… Nous en profitons pour faire la lessive et le plein d'eau. Il n'y a pas à dire, mais faire escale sur une île déserte est épouvantablement délicieux.


Nous passons aussi de bons moments avec nos amis canadiens, John et Naomie et la petite famille Danoise, Klein, Anna et leur deux petits bout de chou de deux ans et neuf mois.



Samedi 28 mai 15 heures. Un beau ketch d'une vingtaine de mètres vient mouiller dans le lagon. Il arrive de Rarotonga avec les Gardiens. Ce sont deux gros gaillards bien costauds et très gentils. Ils débarquent quantité de matériel, bouffe, moteurs, essence, gasoil, batteries, panneaux solaires, matelas etc…. Ils en ont pour six mois d'exil à Suwarrow et ne seront pas ravitaillés si ce n'est quelques cadeaux des voiliers de passage.

Ils s'installent puis nous invitent à passer une soirée avec eux. Chacun apporte un petit quelque chose. John et James, nos gardiens, passent l'après midi à nous préparer des spécialités des îles Cook : Poisson cru au lait de coco, poisson perroquet et mérou grillés, tazard frit sauce soja et des pancakes de coco, le tout arrosé de vins fins et de bière à discrétion avec en dessert un cake à la crème Catalane et du browny au chocolat. De fait, cette soirée se transforme en un vrai petit gueuleton… Et nous voilà tous les onze à nous Bocuser royal sur la petite île de Suwarrow. Si le paradis existe….


Maintenant que nous sommes surveillés, il n'est plus question de braver les interdits. Nous vivons tranquillement au rythme du soleil. Farniente, pêche, lecture, promenade sur le platier… Les jours passent, le temps est magnifique, nous sommes heureux.


Nous faisons de longues promenades sur le platier de corail à marée basse. Cet atoll est resté vierge, hors de portée de la main de l'homme, et nous en prenons plein les mirettes. Le corail est beau, coloré, poissonneux. Contemplation…



Le seul petit bémol : les requins. Omniprésents, sous le bateau, à la plage, sur le platier. Ci-dessus un pointe blanche dont il faut se méfier. Les moins agressifs sont les pointes noires. Ils sont très nombreux dans le lagon et nous devrions pouvoir nager avec eux sans risque… Quoique, les pointes noires de Suwarrow ont mauvaise réputation. Quand à la passe, il est défendu d'y mettre même un simple petit doigt de pied.


Vendredi 3 Juin. Depuis notre arrivée à Suwarrow, j'ai remis en service la réception de fax météo via la B.L.U. Depuis quelques jours, un énorme front froid remonte lentement du sud. Il s'étend sur plus de 9000 km , de ta terre de feu aux Fidji. Il devrait être sur nous d'ici 2 à 3 jours. Le temps va se détériorer, nous devons donc reprendre la mer. L'atoll de Suwarrow est un piège et peu devenir un enfer dans le mauvais temps, il ne faut plus traîner. Nous faisons une dernière fois le tour de l'île et allons saluer nos sympathiques gardiens… Demain, à l'étale de marée haute, vers 11heures, nous prendrons la mer pour les Tonga.

Adieu Suwarrow, petit bijou posé sur l'océan, que de bons moments avons-nous passé ici…

Voyage en voilier.